Aujourd’hui, le contact, s’il est indispensable à l’être humain, apparaît comme une urgence dans notre monde déshumanisé. Nous nous trouvons face au paradoxe entre le développement des moyens de communication pénétrant l’intimité de notre foyer, et l’augmentation de l’isolement et de la dépression.
On parle de point de contact, d’action de contact, de contact immédiat, etc. Par exemple, je suis en contact quand je vais vers quelque chose, quelqu’un. C’est avant tout une action d’aller-vers. Et c’est aussi, par extension, quand je communique avec l’environnement, donc avec un autre. C’est donc l’action de personnes qui communiquent entre elles, qui sont en relation.
On parle alors de contact relationnel, voire de bon ou mauvais contact – mais à quoi ça tient ? il ne suffit pas de savoir parler. Être en contact, c’est donner de soi un ensemble de caractéristiques qui nous sont propres – il s’agit du verbal (les mots) et du non verbal (les gestes, attitudes, comportements, émotions) – et cet ensemble est partagé avec une autre personne donc en interaction.
Le contact est ainsi considéré comme l’expérience première, nécessaire pour exister. Prenons l’exemple des premiers contacts entre le bébé et son caregiver (celui qui prend soin). Le nourrisson a besoin de contact physique, visuel, verbal, pour se sentir en sécurité ; pour ensuite pouvoir se tourner vers le monde extérieur ; pour ensuite prendre conscience de son existence propre en contact avec l’autre. Sans ce contact, suffisant ou suffisamment sécure, l’enfant grandit en privilégiant son temps à s’auto-rassurer, à se (ré)conforter seul ; énergie omniprésente ne lui laissant pas la possibilité de se consacrer pleinement à son développement.
Nous savons donc que les fondements de la sécurité et du développement se trouvent dans le contact. Alors, intéressons-nous à la relation thérapeutique.
Contacter, c’est construire un lieu de rencontre entre soi et l’autre, construire une forme. Et c’est aussi construire du sens favorable au développement de nos relations.
Certains psychiatres et psychanalystes reconnus, ont construit leurs bases thérapeutiques sur la qualité du contact. Pour exemple, Robert NEUBURGER[1] conçoit la thérapie dans Être avec : s’installer autour d’une table, boire un café, et favoriser les conditions à l’émergence d’une demande. A la clinique de La Borde, Jean OURY et Félix GUATTARI envisagent la prise en charge des personnes hospitalisées en vivant avec eux et en effectuant avec eux tous les gestes de la vie, des plus quotidiens aux plus sublimes[2]. Ainsi, quelque soit la forme que prend le contact, il s’agit en thérapie de proposer les conditions de mise en œuvre du contact.
La Gestalt thérapie (gestalt signifiant forme / structure) s’intéresse, elle, particulièrement à la façon d’être en contact et de vivre ce contact. Elle pense le contact comme la réalité première et immédiate (Gestalt thérapie – Fritz PERLS, Ralph HEFFERLINE, Paul GOODMAN[3]). Le contact est donc la condition première à l’expérience dans le sens où l’expérience ne peut se créer sans le contact. Je suis en contact avec l’air pour respirer, la nourriture pour manger, avec l’autre pour exister en tant qu’humain. La gestalt va s’intéresser à la manière d’être en contact avec le monde, par sa prise de conscience dans la relation thérapeutique.
Dès mes premières minutes de vie, je suis en contact puis, si ces contacts se répètent suffisamment, je vais créer des liens et, quand j’aurai intériorisé ces relations, j’aurai créé des liens. Alors l’autre existera aussi à l’intérieur de moi.
Dans la thérapie, j’observe en tant que thérapeute les modalités de contact de mon client. Elles passent par le sensoriel, l’affectif, le cognitif, le social. Je permets ainsi à mon client de prendre conscience de sa manière d’être au monde pour ensuite trouver de meilleurs ajustements. Par la thérapie, elle envisage cette relation comme un tout (sensoriel, affectif, intellectuel, social) et vise à améliorer notre façon d’être en relation avec les autres, avec l’environnement.
Et vous, comment êtes-vous en contact ?
[1] https://robertneuburger.fr/
[2] ROZIER E. – La clinique de La Borde ou les relations qui soignent – Ed. Erès – 2014 – 288 pages.
[3] PERLS F., GOODMAN P., HEFFERLINE R. – Gestalt-Thérapie – Ed. L’Exprimerie – 1951 – 352 pages.